15 propositions pour l'agriculture française

Mis à jour le 04/10/2024

Les femmes sont le visage et l’avenir de la profession agricole, et la MSA s’engage à leur offrir les mêmes reconnaissances que les hommes. Six administratrices de la Caisse centrale de la MSA ont contribué à ce livre blanc : elles nous ont fait part de leurs expériences, analyses, remarques ainsi que 15 propositions qui intègreront les prochaines réflexions pour l’agriculture française.

Le sentiment d’inégalités femmes-hommes face aux métiers du monde agricole exige des mesures fortes

 

Un manque de visibilité des femmes dans le monde agricole

La part des cheffes d’exploitation n’a eu de cesse d’augmenter depuis 1970, passant de 8 % à 34 % aujourd’hui.
Cette évolution démontre une forte volonté d’entreprendre chez les femmes, essentielle au renouvellement des générations. Il est nécessaire de les accompagner tout au long de leur parcours, pour favoriser une plus grande attractivité des métiers du monde agricole.
Alors qu’un agriculteur sur trois est une agricultrice et que près de quatre salariés agricoles sur dix sont des femmes, leur travail et leur place sont encore peu connus et reconnus dans notre société. Partant de ce constat, la MSA a décidé de s’engager pour une mise en visibilité de leur rôle au sein du monde agricole. 

 

Quels sont les freins à l’exercice des métiers agricoles par les femmes ?

La MSA en identifie cinq : 

  • Le statut des femmes non salariées en agriculture : il est essentiel à la reconnaissance d’un travail et pour bénéficier des prestations sociales liées à l’activité. Les femmes du monde agricole sans statut sont considérées inactives alors qu’elles contribuent le plus souvent à la gestion de l’exploitation.
  • Les imprévus liés à la vie de famille : un enfant malade, l’indisponibilité du service de remplacement…Ces aléas liés aux modes de garde, aux congés maternité et congés parentaux sont plus difficiles à appréhender dans le monde rural, là, où les horaires de travail sont le plus souvent atypiques.
  • Les femmes du monde agricole qu’elles soient salariées ou non salariées sont confrontées à des risques spécifiques et un éloignement des soins liés à leur implantation géographique qui nécessitent un accompagnement ad hoc. 
  • L’accessibilité du travail agricole : il s’agit de l’inadaptation du matériel à la morphologie et à l’anatomie d’une femme (taille, poids, ergonomie…) qui implique des difficultés d’exercice, des troubles musculosquelettiques, voire des risques d’accidents.
  • Les constructions et représentations sociétales autour des responsabilités sont encore traditionnellement, dans le monde agricole, trop imprégnées du modèle masculin.

 

La MSA, un soutien renforcé de l’état pour répondre aux problématiques des femmes dans le monde agricole

La MSA, comme opérateur social de référence du monde agricole, contribue à la prévention, l’information et à l’éducation à la santé de ses assurées. La MSA a pris des engagements forts en faveur de la santé globale des femmes en agriculture (sur le plan professionnel, environnemental et personnel) pour notamment améliorer la couverture de vaccination antigrippale, élargir la pratique de l’entretien motivationnel par téléphone afin de les sensibiliser à la réalisation des dépistages organisés des cancers, ou encore accompagner méthodologiquement et financièrement les projets issus du territoire visant à améliorer la santé des femmes au plus proche de leur quotidien.

Reconnaître le travail des agricultrices en donnant un statut à chacune d’entre elles

Le travail des femmes non-salariées en agriculture est historiquement marqué par une invisibilité sociale et politique.
Cela fait seulement 25 ans que le statut de conjoint collaborateur a été créé par le législateur, permettant ainsi aux agricultrices de devenir « visibles juridiquement ». Or, il reste encore trop de femmes sans statut, qu’il est difficile d’atteindre.
Sans  statut, les femmes du monde agricole ne peuvent pas, par exemple, préparer leur retraite, prétendre à la prime d’activité ou encore à une pension d’invalidité en cas d’inaptitude totale ou partielle au travail.
Or, ces femmes contribuent à la gestion de l’exploitation sans en avoir la reconnaissance, par exemple à travers des tâches administratives.

Proposition 1
Engager des campagnes de communication pour sensibiliser à l’importance d’un statut pour les femmes et les conséquences fortes de l’absence de statut.

Proposition 2
Proposer systématiquement un rendez-vous aux personnes concernées par la limitation du statut de conjoint collaborateur à cinq ans pour définir avec elles le statut vers lequel basculer.

 

Créer les conditions pour concilier vie professionnelle, personnelle et vie de famille

Selon le baromètre Vérian – MSA, « Les Femmes dans le monde agricole », 41 % des femmes du monde agricole ne sont pas satisfaites de leur équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle. Les nouvelles générations recherchent, en particulier, une charge et un rythme de travail acceptables, qui se rapprochent de ceux des autres secteurs d’activité.
Comme l’expérience récente de la pandémie de Covid-19 l’a montré, la division du travail domestique reste inégale.
Ces inégalités sont d’autant plus accentuées par l’explosion des familles monoparentales avec enfants mineurs, salariées et non salariées. 
Les femmes sont également souvent aidantes. On estime à 3 millions leur nombre en milieu rural. Qu’elles accompagnent un enfant en situation de handicap ou plus largement un proche fragilisé par l’âge ou la maladie, ces femmes doivent aussi concilier leur vie professionnelle et leur vie personnelle avec leur rôle d’aidante. 
Pour les agricultrices, le moment de l’installation est déterminant, notamment pour les sensibiliser au droit au répit et au service de remplacement.

Proposition 3
Développer un réseau de soutien et une communication spécifique en direction des femmes victimes de violence, vivant dans les territoires ruraux.
 
Proposition 4
Permettre un recours au service de remplacement au-delà des 35 heures hebdomadaires.
 
Proposition 5
Proposer une offre de garde en milieu rural aussi développée et abordable qu’en milieu urbain, avec une prise en charge financière plus élevée pour les familles monoparentales.

 

Répondre aux besoins de santé spécifiques des femmes du monde agricole

La santé des femmes en agriculture doit être abordée selon trois angles : pour elles-mêmes, en tant que vecteur pour la santé de la famille et pour permettre aux femmes aidantes de rester en bonne santé.
Pour accompagner les agricultrices, non-salariées et salariées, la MSA se distingue par une approche attentionnée et centrée autour de la méthode motivationnelle. Il convient d’aller encore plus loin dans cette démarche pour renforcer la prévention et lutter contre l’accroissement des déserts médicaux.
 

Proposition 6
Renforcer l’aide au répit en proposant un congé en cas de maladie grave chez l’enfant.
 
Proposition 7
Faciliter une visite systématique chez le gynécologue ou la sage-femme, aux âges clés de la vie, pour les femmes du monde agricole afin de relancer le suivi et leur permettre de bénéficier des actions de prévention et de dépistage, de suivi de la grossesse et de la prise en charge de la ménopause. Par exemple, en développant et en soutenant les initiatives de consultations de gynécologues itinérantes.
 
Proposition 8
Mettre en place des visites spécifiques, pendant la grossesse et lors de l’accueil du jeune enfant, pour les femmes salariées et non-salariées qui manipulent des produits spécifiques et subissant des conditions de travail avec usure professionnelle.

 

Faciliter l’accès aux métiers du monde agricole 

Parmi ses missions, la MSA agit pour prévenir les principaux risques professionnels agricoles : le machinisme, les chutes de hauteur, les troubles musculosquelettiques et psychosociaux.
La santé-sécurité au travail et l’accessibilité du travail agricole sont essentiels pour favoriser l’attractivité des métiers pour les femmes et le renouvellement des générations. 

Proposition 9
Obtenir une parité dans les commissions d’homologation du matériel pour intégrer de nouveaux critères (morphologie, poids du matériel…).

Proposition 10
Favoriser la mise en place d’une organisation du travail qui contribue à la bonne santé physique et mentale en développant la prévention primaire des TMS/TPS au travers, notamment, de formations « gestes et postures » visant à prévenir les accidents du travail. Plusieurs applications pourront être développées : viticulture, manutention, tailles des vignes et des arbres, traite et manipulation des bovins, tâches administratives, etc.

 

Donner les moyens aux femmes du monde agricole de prendre des responsabilités professionnelles et sociales 

Les femmes sont encore trop absentes des responsabilités citoyennes, soit parce que leur temps personnel empiète déjà sur le temps professionnel, soit parce qu’elles considèrent que ce n’est pas leur place. La sensibilisation des nouvelles générations aux enjeux sociaux et sociétaux des métiers agricoles semble dès lors essentielle. À tous les niveaux, la formation est le meilleur moyen d’acquérir des compétences, de l’assurance et d’accepter la prise de responsabilité.

Proposition 11
Favoriser l’engagement de toutes et de tous en mettant en place des modules de formation « égalité femmes-hommes » dans les enseignements agricoles et dans les futures « France services agriculture » au moment de l’installation.

Proposition 13
Créer des avantages fiscaux ou des dérogations fiscales quand les femmes s’engagent – notamment pour les familles monoparentales.

Proposition 12
Développer des services de remplacement « vie de famille » qui puissent aussi servir pour les gardes d’enfants, afin de libérer du temps aux femmes souhaitant avoir un engagement citoyen.

Proposition 14
Faciliter le recours à l’aide à domicile pour toutes les femmes qui en ont besoin.

Proposition 15
Assurer une représentation paritaire lors des élections MSA analogue à celles des chambres d’agriculture : chaque liste comportant au moins un candidat de chaque sexe par tranche de trois candidats. Les organisations professionnelles agricoles pourraient s’inscrire dans la même dynamique.